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Plainte constitutionelle CP VS DPP

Sir Geoffrey Cox, KC : «Le DPP n’est pas le représentant d’une partie privée mais de l’intérêt public»

13 septembre 2024, 14:08

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Sir Geoffrey Cox, KC : «Le DPP n’est pas le représentant d’une partie privée mais de l’intérêt public»

Pendant plus de six heures de plaidoirie, le King’s Counsel Geoffrey Cox (à g.), a expliqué à la Cour, le rôle crucial que joue le DPP dans les procédures pénales.

L’examen de la plainte constitutionnelle déposée par le commissaire de police Anil Kumar Dip contre le Directeur des poursuites publiques, Mᵉ Rashid Ahmine, s’est poursuivi hier avec les plaidoiries de sir Geoffrey Cox, KC, représentant du DPP. Durant plus de six heures de plaidoirie, l’avocat de la Couronne, assisté du Senior Counsel Mᵉ Sanjay Bhuckory, a tout mis en oeuvre pour convaincre la Cour de l’importance du rôle central que joue le DPP dans les procédures pénales. Sir Geoffrey Cox, KC, a fait ressortir que le DPP n’est pas le représentant d’une partie privée ou d’un quelconque intérêt particulier. Son rôle, dit-il, est de veiller à ce que l’intérêt public soit représenté dans les affaires criminelles. «Il ne défend pas uniquement les intérêts de la victime, mais également ceux de la société dans son ensemble, y compris l’intérêt de la justice. Contrairement aux autres avocats, le DPP et ses collaborateurs n’ont pas à concilier leur devoir envers le tribunal et envers la justice avec une éventuelle obligation conflictuelle envers un client. Cette particularité fait du DPP un acteur clé du système judiciaire, garantissant que chaque affaire pénale soit traitée en fonction de l’intérêt général, en assurant un équilibre entre les droits de la victime, de l’accusé et de la société», a soutenu le King’s Counsel.

Selon sir Geoffrey Cox, la décision d’accorder ou de refuser une libération sous caution est l’une des plus cruciales dans le processus pénal. Le King’s Counsel insiste sur le fait que l’exercice approprié du pouvoir discrétionnaire du DPP est fondamental pour le bon déroulement du processus de libération sous caution. «Le DPP doit agir avec objectivité, indépendance et équité dans chaque affaire afin d’assurer une prise de décision fondée sur des principes juridiques solides, en tenant compte des circonstances propres à l’accusé et à l’infraction, tout en évitant les pressions extérieures ou autres considérations inappropriées», souligne le King’s Counsel.

Sir Geoffrey Cox a démontré que les poursuites menées par la police sont courantes à Maurice, bien qu’aucune poursuite ne puisse être engagée par la police devant la Cour suprême ou la Cour intermédiaire sans l’intervention du DPP. À l’exception de rares cas, seul le DPP peut poursuivre devant la Cour suprême au nom de l’État. Par conséquent, les poursuites policières se déroulent principalement devant les tribunaux de district et, avec le consentement du DPP, devant la Cour intermédiaire. «The DPP, therefore, possesses very broad statutory obligations and powers to monitor and supervise the institution of criminal proceedings in the courts of Mauritius by the police; the above provisions mean that the police are obliged to consult the DPP in seeking to bring charges», dit-il.

Révision continue d’une détention

L’article 5 de la Constitution, poursuit sir Geoffrey Cox, impose une obligation continue aux tribunaux de réévaluer, à intervalles réguliers, la nécessité de maintenir un suspect en détention. Cette évaluation ne dépend pas uniquement d’une demande du suspect ou de son représentant légal. Ainsi, les décisions d’accepter ou de s’opposer à la mise en liberté sous caution dans les procédures pénales, que ce soit à Maurice ou ailleurs, sont parmi les plus cruciales dans le processus pénal. Ces décisions incluent également les recommandations à faire au tribunal concernant les conditions de la libération sous caution. «Il est essentiel de maintenir une révision continue de la nécessité de la détention. Il est primordial que les questions soient présentées au tribunal avec cohérence, objectivité, indépendance et équité dans chaque affaire, et que des informations complètes soient fournies au tribunal concernant les circonstances, qu’elles soient en faveur ou au détriment du suspect. Le DPP maintient ce système de révision du bail afin d’assurer la cohérence et la qualité des décisions», souligne le KC.

Contrairement à d’autres juridictions du Commonwealth, pour Maurice, il n’existe pas de limites de temps légales imposées à la police pour inculper ou libérer un suspect arrêté. «Cela peut entraîner des détentions prolongées sous des accusations provisoires, parfois pendant des années, alors que les enquêtes continuent sans décision claire de la part du DPP», explique le KC. Sir Geoffrey Cox met en lumière le rôle crucial du DPP, que la Cour suprême de Maurice a décrit comme ayant un devoir continu de surveiller et d’accélérer les enquêtes, tout en intervenant lorsque la détention prolongée d’un suspect n’est plus justifiée. Les décisions relatives à la libération sous caution, même en présence d’une charge provisoire, sont tout aussi importantes, car elles affectent directement les droits à la liberté du suspect. Sir Geoffrey Cox insiste sur le fait que l’implication du DPP dès le début de ces procédures est essentielle pour équilibrer l’intérêt public et les droits individuels, tout en prenant en compte l’évolution des preuves et la probabilité d’un procès.

«Not essentially a police matter»

Selon sir Geoffrey Cox, l’article 72 de la Constitution n’impose aucune restriction quant à l’application des pouvoirs du DPP, qui s’étend à toutes les procédures pénales, même avant la conclusion d’une enquête. Le DPP peut initier des poursuites à tout moment, y compris à un stade précoce de l’enquête, s’il le juge nécessaire. Cette pratique permet à la police de déposer une information provisoire devant le tribunal de district, ce qui justifie les ajournements en attendant la poursuite des investigations et l’examen ultérieur par le DPP. Le King’s Counsel conteste l’idée selon laquelle la charge provisoire est exclusivement une affaire de police, soulignant que le DPP joue un rôle actif dès le début des enquêtes. Il affirme qu’il est de l’intérêt public que le tribunal soit pleinement assisté afin de rendre un jugement équitable, conformément à l’article 10 de la Constitution, qui garantit un procès équitable. Ainsi, le DPP doit surveiller de près les enquêtes en cours et veiller à ce que les poursuites pénales soient menées dans l’intérêt de la justice. Sir Geoffrey Cox soutient que les pouvoirs du DPP ne se limitent pas aux poursuites finales mais incluent la supervision des charges provisoires et des enquêtes en cours, en vue de garantir un processus pénal équitable et transparent. «It would be absurd to contend that the proceedings of a preliminary inquiry were essentially a police matter», a conclu le KC. Le représentant du commissaire de police, le King’s Counsel Paul Ozin, a débuté sa plaidoirie hier après-midi et celle-ci se poursuivra aujourd’hui.