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Victor Genestar : «La vente d’alcool est un point essentiel pour la survie des festivals

25 novembre 2024, 19:00

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Victor Genestar : «La vente d’alcool est un point essentiel pour la survie des festivals

L’organisateur de «Dreamers» prévue pour le vendredi 29 novembre et du festival «La Isla 2068» revient sur les fuites d’écoutes téléphoniques de «Missie Moustass». La voix attribuée à Kobita Jugnauth, l’épouse de l’ex-Premier ministre, y évoque un concert au Château de Labourdonnais où des artistes d’une communauté spécifique ont scandé «BLD» en présence de Bruneau Laurette. Le festival «La Isla 2068» se tient annuellement au Château Labourdonnais.

Vous vous sentez libéré depuis le 11 novembre (NdlR, date des résultats des élections générales) ?

Complètement! On a un poids en moins sur la tête. On est confiant en l’avenir. On est soulagé mais on reste très exigeant sur nos demandes parce que, pour l’instant, rien n’a changé.

Le vendredi 29 novembre, vous organisez la 19e soirée «Dreamers». Vous n’avez pas eu de difficultés avec les permis ?

Non. Dreamers au départ, c’était un afterwork, qui ne finit pas trop tard. Comme c’est dans un hôtel, la soirée s’arrête à 23 heures et on a le droit de vendre de l’alcool. C’est pour le festival La Isla 2068, prévu le 3 mai 2025, que l’on va voir ce qui va se passer concernant la vente d’alcool. On va contacter les autorités à ce sujet dans pas longtemps, notamment le ministre des Arts et de la culture (NdlR,* l’interview a été réalisée avant la prestation de serment du vendredi 22 novembre*). Ce sera forcément quelqu’un qui est au courant de la répression qui a lieu en ce moment. La vente d’alcool est un point essentiel pour la survie des festivals. On espère qu’il y aura a minima des permis temporaires selon les organisateurs, selon les lieux.

Vous réclamez bien l’autorisation de la vente d’alcool pour des raisons économiques

C’est un tiers de nos revenus. Oxenham, avec une bière artisanale, est toujours notre partenaire même si la société ne peut pas vendre ses produits pendant le festival. Si La Isla 2068 veut continuer à avoir des têtes d’affiche locales et internationales, la vente d’alcool est vitale. C’est pareil pour les autres festivals. On ne pourra pas organiser une édition chaque année si la loi ne change pas. On ne pourra pas assurer les cachets des artistes. Si les choses ne changent pas très vite, le secteur musical devra continuer à bricoler. Cela peut être régulé, par exemple en autorisant des alcools soft comme des bières. À La Réunion, il y a des grades selon le type d’alcool vendu. Des discussions sont possibles. C’est à nous de sensibiliser le public sur la nécessité de boire avec modération.

En tant qu’organisateur vous êtes prêt à assurer la sensibilisation contre l’abus d’alcool dans vos festivals ?

C’est indispensable. À La Réunion, en France, c’est obligatoire. Dans chaque festival, il y a des stands où des équipes distribuent des alcootests, parlent aux festivaliers qui quittent la soirée pour s’assurer qu’ils sont en état de conduire et encourager le co-voiturage. On peut travailler avec des associations pour la prévention. C’est une discussion que l’on aimerait bien avoir avec le nouveau ministre des Arts et de la culture.

Vous étiez à la conférence de presse des organisateurs mécontents après la diffusion de fuites d’écoutes téléphoniques de «Missie Moustass». C’était le 8 novembre. Au final, les conditions défavorables ont encouragé la solidarité parmi les organisateurs ?

L’une des bandes nous concernait indirectement. Effectivement, tout ce qui s’est passé a créé une solidarité entre certains organisateurs, notamment entre nous et Reggae Donn Sa de Bruno Raya. On partage les mêmes problématiques même si on est dans des univers très différents. L’ambition de La Isla est de générer du tourisme culturel. Pour cela, il faut des têtes d’affiche attrayantes. Et que le touriste ne sente pas qu’il y a des restrictions, ce qui pose problème pour inciter les gens à venir au festival. On compte sur le ministre des Arts et de la culture pour nous accompagner dans cette conviction qu’un festival contribue à l’économie locale et au tourisme.

Quelle a été votre réaction en entendant la voix attribuée à Kobita Jugnauth, l’épouse de l’ex-Premier ministre, critiquant une soirée au Château Labourdonnais ?

On n’a pas du tout été surpris. On savait que la répression subie par les festivals venait d’en haut. Même la police nous a dit que la décision venait d’en haut quand l’interdiction de vendre de l’alcool est tombée 48 heures avant le festival La Isla le 13 mai 2023. Les propos tenus dans cette bande sonore sont pathétiques. Ils révèlent une méconnaissance totale du sujet de la part des autorités, ainsi qu’une incompétence flagrante, comme si elles ignoraient ce qu’est réellement un festival. Un festival, c’est avant tout la mixité et l’ouverture. C’est malheureux de s’attaquer au festival La Isla alors que notre démarche est d’être le plus inclusif possible. On est engagé socialement avec l’ONG Vent d’un rêve. Ces propos montrent des amalgames insensés et complètement faux. On met tout le monde dans le même panier en donnant l’impression qu’on ne programmerait que des artistes créoles pour un public qui serait virulent contre le gouvernement. Alors que notre programmation essaie d’être la plus variée possible, avec la volonté de rassembler des personnes de tous horizons sans aucune barrière.

Pendant la conférence de presse, Bruno Raya de Live N Direk Entertainment a affirmé que des organisateurs avaient fait un «pèlerinage auprès des leaders de différents partis avant les élections générales». Avez-vous participé à ce pèlerinage ?

Non. Nous étions en contact avec le ministère des Arts. Je ne parle pas du ministre qui n’a servi à rien mais de l’équipe du ministère qui veut essayer de nous aider. Nous avons essayé de sensibiliser certaines personnes en les invitant à nos événements.

Comment avez-vous accueilli les concerts de remerciement à Rose-Hill et à Port-Louis ?

C’est un excellent signal qui montre que la nouvelle équipe est connectée avec le secteur musical. Beaucoup d’artistes ont participé. On parle de deux emplacements emblématiques : le Plaza et la place d’Armes. Ce sont des endroits où il était impossible d’organiser des concerts dans le passé. Après, on parle de meetings politiques ; c’est un peu différent. J’espère qu’un jour, on aura des autorisations pour faire des festivals dans ces lieux-là.

En parlant de lieu emblématique où ce n’est pas possible d’organiser des concerts, vous vous voyez retourner à la Citadelle (NdlR, l’intrusion d’un groupuscule à la Citadelle a eu lieu pendant un concert co-organisé par «La Isla» le 21 octobre 2023) ?

Le concert à la Citadelle avait été organisé avec les hôtels Attitude. On aimerait beaucoup y retourner ; malheureusement, le contexte est délicat. On ne va pas faire n’importe quoi. Dans un monde idéal, la Citadelle devrait être le plus bel écrin pour organiser des festivals à Maurice.