Publicité

Circonscription n°19: le développement n’a pas touché tout le monde

2 novembre 2019, 10:56

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Circonscription n°19: le développement n’a pas touché tout le monde

Impossible de parler de la circonscription n°19 (Stanley–Rose-Hill) sans parler des changements majeurs occasionnés par l’arrivée du Metro Express. Développement oblige, la gare routière de Rose-Hill, centre névralgique de la ville, a été métamorphosée en quelques mois pour devenir une station de métro. Mais parmi les 38 433 électeurs de la circonscription, tous ne se sentent pas concernés par ce projet. Eux, ils souhaitent simplement améliorer leur quotidien.

Il est 13 heures. La gare de Rose-Hill, un mastodonte de béton, est masquée par un léger hâle permanent de poussière. La construction de la structure est pratiquement terminée. Mais autour de la gare, c’est une autre histoire. Des fils traînent sur le sol recouvert de terre. Des dalles de béton, qui serviront à faire le parvis de la gare, ne sont pas encore installées. Sous la gare, les ouvriers étrangers se reposent à même le sol. Certains font la sieste, d’autres jouent sur leurs téléphones. Mais ils sont bien les seuls à être aussi tranquilles.

Du côté des opérateurs d’autobus, le calme et la sérénité ne règnent pas. Si tous sont d’accord que le développement est primordial pour le pays, Aurore, elle, explique qu’il fallait un meilleur planning. Cette receveuse revient sur les problèmes que ses confrères et ellemême rencontrent en ce moment. Depuis que la gare est devenue un chantier gigantesque, les autobus de plusieurs destinations ont été déplacés vers une gare de fortune, située plus loin. «Déza, kot inn met bis aster la, bizin pran bis dépi laba pou vinn lagar pou manzé», déploret- elle. Mais ce n’est pas le seul problème. Outre le fait qu’il n’y ait pas de commerce pour se sustenter, il n’y a ni toilettes ni abri pour les passagers. «La moindre des choses aurait été de nous informer des conditions dans lesquelles nous allions travailler en amont du projet», lâche-t-elle.

Mais il n’y a pas que les bus à la gare. D’autres artisans gravitent autour et les constructions ont aussi eu un impact sur eux… Dovic a 27 ans. Il est cordonnier et est installé à la gare depuis des années. Lui aussi, il fait les frais de la construction. «Travay inn tonbé», affirme l’artisan. Mais il ne se plaint pas. Il arrive quand même à «gagn so lazourné». Et la pile de chaussures et savates en attente de réparation devant lui en témoigne. Puis, il y a aussi la poussière, qui salit les chaussures de ses clients… Mais il ne se plaint toujours pas. «Mo zis anvi zot les mwa res lamem apré. Donn mwa enn ti baz korek mo kontign travay», dit-il, avant de retourner à ses aiguilles et semelles.

Quittons le centre-ville pour aller vers Trèfles, dans les faubourgs de Rose-Hill. Ici, les considérations sont loin, voire très loin, du développement et de l’économie. La misère, les vols et le manque de loisirs préoccupent plus les habitants que le métro. Jean Alfred Kattic, ancien toxicomane sous traitement de méthadone, fait partie de ceux-là. Âgé de 46 ans, l’homme, qui travaille comme maçon lorsque les contracteurs font appel à lui, dit qu’il est un oublié de la société. Cela fait six mois que sa maison a pris feu. Depuis, il vit dans un taudis à peine éclairé, entouré de décombres.

«Enn kamion pou pran mwa ser pou pran sa bann salté-la. Bé lerla, tou res lamem», dit-il, la voix fatiguée. Après l’incendie de sa maison, il a fait appel à la sécurité sociale, mais n’a eu que Rs 4 000 de compensation. Et il n’a pas droit aux pensions car il n’a ni maladies ni handicaps. Les élections sont loin de ses préoccupations. De toute façon, «bann dépité- la, pa trouv zot mem. Zot pa vinn tap laport isi». Mais s’il les voyait, il aura une seule demande : qu’ils l’aident à trouver un travail décent afin de sortir de la misère. Ou, au moins, l’aider à débarrasser sa maison des décombres, histoire qu’il retrouve un peu de salubrité chez lui…

Mais tous les habitants de Trèfles n’ont pas les mêmes soucis. Joëlle, elle, vient d’une famille d’entrepreneurs. Cela fait 15 ans qu’elle habite dans la région. Les changements qu’elle veut voir ? Un peu plus de patrouilles policières. La situation, selon elle, est critique. Récemment, il y a eu pas moins de trois vols en une semaine dans la région. Et une présence policière régulière aurait aidé à améliorer la situation. L’autre problème de taille est l’accès aux soins. Certes, il y a un dispensaire pour les habitants. « péna tou medsinn. Get bann dimounn ki swiv tretman Candos ou Jeetoo. Kan éna pou pran medsinn, zot ti kapav pran dispanser mem olié al lwin sak fwa. Sirtou bann vié dimounn.»

Sur ces entrefaites, sa belle-mère rejoint la conversation. Elle fait face à ce problème souvent car elle a fait un accident il y a quatre ans, et elle a souvent dû faire de longs trajets pour ses soins. «Mais attention, je ne me plains pas. Bien au contraire !», tient à préciser la dame. Si au début, elle a fait une dépression, car après l’accident, elle ne pouvait plus travailler, la situation a changé aujourd’hui. Il y a deux ans, les autorités ont doté Trèfle d’un centre d’activités et depuis, elle y va souvent. «Je suis beaucoup de cours.» Entre la peinture, la couture, la pâtisserie et le développement de l’enfant, ses journées sont bien occupées. «Apré, kan mo vinn lakaz, mo explik bannla. Tansion zot dir mwa mo pa koné, mwa kinn swiv kour», lâche-t-elle sur un ton déterminé. Rendez-vous après les élections pour savoir si toute la circonscription verra le même développement que Rose-Hill…